Dupont et Dupond chez LR

Laurent Joffrin | 06 Décembre 2022

Le duel Ciotti-Retailleau pour la présidence de LR ? Une bataille de jumeaux.

Les deux candidats ont adopté la légendaire rhétorique des deux policiers à chapeau melon qui hantent les albums de Tintin, symbolisée par la célèbre locution : « Et je dirai même plus… » Ciotti : « il sauver l’identité française ». Retailleau : « Et je dirai même plus, il faut sauver l’identité française ». Ciotti : « Il faut mettre fin à l’immigration sans contrôle ». Retailleau : « Et je dirai même plus, il faut mettre fin à l’immigration sans contrôle ». Ciotti : « Il faut une droite fière ». Retailleau : « Et je dirai même plus : il faut une fierté de droite ». Chapeau noir et noir chapeau.

Les militants LR choisiront sans doute Dupont-Ciotti, qui parle en général le premier, obligeant Dupond-Retailleau à une solennelle duplication. Ciotti avait déjà appliqué la même stratégie lors de la primaire pré-présidentielle, réalisant un score inattendu face à Valérie Pécresse, laquelle s’est effondrée en cours de route, valorisant par là-même le discours très droitier de son concurrent immédiat.

L’ennui, bien sûr, est que ces dialogues burlesques ne sont pas signés Hergé, mais Marine Le Pen. Poussés par une base de plus en plus réactionnaire, les chefs de LR veillent à creuser un fossé idéologique profond avec le macronisme « progressiste » et utilisent la terre ainsi extraite, tel le sapeur Camember, pour combler celui qui les sépare du lepénisme. Retailleau imite Ciotti qui imite Le Pen. Voilà qui traduit avec éclat l’emprise culturelle de l’extrême-droite sur les militants LR.


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Évitons les clichés : cette tactique n’est pas toujours absurde. En 2007, Nicolas Sarkozy s’était fait élire en reprenant certains thèmes lepénistes dont il avait pimenté son discours, siphonnant une bonne partie des voix de l’extrême-droite. Ciotti adopte la même tactique, même si Sarkozy, cette fois, conseille à la droite de s’allier avec Macron, lequel ne demande que cela.

Au-delà du comique involontaire, tout cela n’a rien de rassurant. Car si cette triangulation échoue, si la droite ne parvient pas à reprendre du terrain sur le RN en reproduisant son discours, elle n’aura d’autre choix pour survivre que de s’allier avec lui, tombant dans le piège qu’elle aura elle-même tendu. Tels Dupont et Dupond dans « Tintin au pays de l’or noir », tombant dans un lac parce qu’ils poursuivaient un mirage.

 

Crédit photo :  La Libre.be


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Zemmour et ses zélotes

Le fondateur de Reconquête et ses partisans sont obsédés par les islamistes… jusqu’à reprendre leurs méthodes. Depuis des semaines, ils harcèlent une professeure du nord, par ailleurs animatrice d’un collectif de soutien aux migrants, qui a eu l’audace d’emmener des élèves de prépa visiter un campement. Dénonciation publique, insultes, menaces de mort, ils ont déclenché une vague de violences verbales qui met en cause, désormais, la sécurité physique de l’enseignante. Zemmour se fait le prophète d’une future guerre civile. Pour montrer qu’il a raison, il est prêt à en créer les conditions…

 

Comme d’hab, Sarkozy devant la justice

L’ancien président, décidément abonné aux prétoires, plaide en appel dans l’affaire « Bismuth ». Il conteste la validité des enregistrements produits par l’accusation et nie qu’il s’agisse d’une tentative de corruption. Pour y voir plus clair, on conseille la lecture desdits enregistrements qui a valu à Nicolas Sarkozy et à son avocat Thierry Herzog une condamnation à de la prison ferme en première instance (aménagée en détention à domicile pour l’ancien président). Les deux prévenus arguent qu’il est interdit d’écouter les conversations entre un avocat et son client. La justice répond que ces échanges avaient pour but de commettre une infraction, ce qui lève, selon elle, l’interdiction d’écouter. Quant au contenu des conversations, il a toutes les apparences d’une preuve : Sarko et Herzog parlent bien d’un contact par eux établi avec un membre de la Cour de cassation, Gilbert Azibert, chose illégale. Dans l’une d’elles, Herzog fait état d’une demande d’intervention présentée par Azibert en sa faveur (un poste honorifique à Monaco), ce à quoi Sarkozy répond : « Je l’aiderai ». Les juges ont ainsi considéré qu’il y avait service rendu d’un côté par Azibert et promesse de service en retour par Herzog et Sarkozy, ce qui justifie selon eux la condamnation. Les deux hommes font valoir que le service en retour n’a pas eu lieu, ce qui est exact, mais les juges de première instance ont estimé que la promesse suffit à caractériser l’infraction. La cour d’appel doit trancher…

Laurent Joffrin

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Président du mouvement @_les_engages