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Le scoop étrange du Figaro
Voici que Le Figaro promeut en gloire un dénommé Brochand, ancien patron de la DGSE, qui annonce sur un ton sans réplique l’imminence d’une guerre civile suscitée par la minorité musulmane. Péremptoire et brutal, cet illustre inconnu dessine un programme d’immigration zéro, une rupture avec toutes les conventions protégeant les droits humains, l’abolition du droit du sol, entre autres mesures novatrices qui ravaleraient la France au rang des nations les plus fermées du monde démocratique, une sorte de Hongrie tricolore, enfermée et barricadée.
Ce prophète halluciné bénéficie de l’autorité supposée de ses anciennes fonctions et de sa qualité d’ambassadeur, censée lui donner un air d’impartialité lucide. Ce qu’oublie de mentionner le Figaro, c’est que ce témoin soi-disant désintéressé a fait partie de l’équipe programmatique d’Éric Zemmour pendant la campagne présidentielle, et qu’il se contente en fait de reproduire d’un ton encore plus grandiloquent la rhétorique xénophobe du fondateur de Reconquête. Drôle de scoop, tout de même.
La lettre politique de Laurent Joffrin | S'abonner
L’affaire n’enlève rien à la qualité des reportages et des enquêtes du quotidien, qui reste un journal de référence. Mais il s’agit de politique et non de journalisme. Longtemps, le Figaro est resté sur sa ligne conservatrice et libérale, occupant avec sérieux le créneau de la droite républicaine, oscillant entre gaullisme et sarkozysme. A-t-il décidé de se vouer à une opposition aussi atrabilaire qu’identitaire, qui hésiterait désormais entre lepénisme et zemmourisme ? La question se pose.
Signe des temps, en tout cas… De plus en plus, l’ancienne droite bourgeoise se radicalise, gagnée par le nationalisme ambiant et prépare, consciemment ou non, la conjonction des droites dures, à l’image de ce qui s’est passé en Italie, ce laboratoire de la politique européenne.
Crédit photo : Shutterstock
ET AUSSI
Crépuscule du trumpisme ?
Face à un candidat adoubé par Trump, le démocrate Raphael Warnock conserve son siège de sénateur de la Géorgie. Habituellement aux États-Unis, la majorité au pouvoir est étrillée dans les élections intermédiaires. Cette fois, alors même que les États-Unis se débattent dans de multiples crises, le parti démocrate limite ses pertes à la Chambre des Représentants et améliore son score au Sénat. A cela une explication principale : l’intervention de Donald Trump dans le scrutin a nui au parti républicain. Celui-ci en est d’ailleurs conscient : il songe fortement à porter sur le pavois le gouverneur de Floride Ron DeSantis, en lieu et place du milliardaire à la mèche. Le nouvel impétrant n’est guère moins conservateur que Trump, mais il se garde des outrances qui ont émaillé la carrière de l’ancien président. Après la défaite de Bolsonaro, au Brésil, la chute de Trump pourrait bien être le signe d’un essoufflement de ce populisme tonitruant qui semblait jusque-là irrésistible dans nombre de démocraties, au profit d’une droite plus présentable mais tout aussi dure. Le nationalisme adopte une manière plus policée : il n’en est pas moins dangereux.
La jeune fille et l’innocent
À lire dans Le Monde, l’excellent papier de Pascale Robert-Diard. Précis et sobre, il conte la lamentable histoire d’un jeune Farid accusé à tort de viol par une jeune fille qui a menti pour de multiples et tragiques raisons. Farid a été condamné à la prison et à l’opprobre sociale. Vingt ans après, on vient de reconnaître son innocence. Rarissime, l’exemple n’enlève rien à l’urgence de la lutte contre les violences faites aux femmes, scandaleusement et trop longtemps entravée par le machisme ambiant. Il rappelle seulement que la justice n’a pas forcément tort de tenir à l’administration de preuves tangibles avant de condamner un prévenu.