Les carabiniers de la Covid - Lettre politique #46

Laurent Joffrin | 04 Janvier 2021

Dans l’opéra-bouffe d’Offenbach, Les Brigands, les lourdes bottes des carabiniers s’entendent de loin, ce qui avertit les brigands de leur venue. Du coup, les pandores arrivent toujours trop tard. On connaît le chœur célébrissime : Nous sommes les carabiniers/La sécurité des foyers/Mais, par un malheureux hasard/Au secours des particuliers/Nous arrivons toujours trop tard. 

Les ministres macroniens sont les carabiniers de la Covid. Ils font beaucoup de bruit avant les échéances mais, à l’heure dite, ils sont absents. Le virus les entend de loin. Ainsi pour les masques, pour les tests, pour les précautions à prendre au moment du déconfinement. Ainsi pour les vaccins en ce début d’année. Ce sont des spécialistes des coches manqués, des trains ratés et des métros de retard.

Colonel de cette troupe maladroite, Emmanuel Macron a donné hier de la voix.  Du coup, on a avancé d’un mois la vaccination des personnels soignants. On se demande pourquoi elle avait été programmée si tard… On a surtout du mal à comprendre comment le président pouvait ignorer la prudence excessive de ce calendrier, par définition arrêté au sommet. Et on devine ce qui s’est passé : constatant que les Français se méfient du nouveau vaccin, Emmanuel Macron a décidé qu’il était urgent d’attendre ou, à tout le moins, de commencer très doucement, comptant à terme sur l’effet d’entraînement. Puis, voyant que nos voisins européens sont beaucoup plus rapides, il met en scène un coup de colère.

Il est vrai, à sa décharge, que dans un sondage de ce matin (France-Info-Odoxa), 58% des personnes interrogées annoncent qu’elles ne se feront pas vacciner, chiffre accablant, l’un des pires en Europe. Favorisé par des réseaux sociaux socialement funestes, l’obscurantisme est majoritaire au pays des Lumières.

On dira que les errements du pouvoir y sont pour beaucoup. Peut-être. Mais il faut aussi souligner l’influence pernicieuse de l’extrême-droite, qui a systématiquement semé le doute sur la stratégie vaccinale, pourtant la seule à même de nous sortir de l’enfer de la Covid. Sans refuser frontalement la vaccination, Marine Le Pen a mis en cause le vaccin Pfizer en clamant qu’on manquait de recul (ce qui n’est guère étonnant, s’agissant d’un vaccin nouveau). Elle a ainsi balayé d’un revers de main les tests effectués dans les règles de l’art, tout comme l’avis des autorités de santé partout dans le monde. Elle préfère, dit-elle, « les vaccins traditionnels ». Ils ont un seul défaut : ils ne sont pas disponibles à ce jour.

Marine Le Pen attend que d’autres essaient le produit Pfizer avant elle – une preuve de courage personnel ; ce qui revient à torpiller la campagne préventive en cours – un signe de haute responsabilité de la part de celle qui brigue toujours la présidence de la République. Toute honte bue, le Rassemblement national proteste maintenant contre la lenteur de la vaccination !

L’histoire dira l’écrasante responsabilité de la droite de la droite dans les retards de la lutte contre le coronavirus (apologie du docteur Raoult pour qui seule la chloroquine de Perlin-Pimpin était légitime, protestation contre les mesures sanitaires, complotisme galopant, dénigrement des vaccins, etc.). Et on se souviendra de la faiblesse du pouvoir macronien qui, au détriment de la santé publique, s’est laissé impressionner.

Laurent Joffrin

À propos de

Président du mouvement @_les_engages