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M comme Marine, M comme mensonge
Ce qui frappe dans la campagne du Rassemblement national, c’est le double langage. Le loup se déguise en grand-mère – grand-mère avenante, avec ses chats et ses sourires sur toutes les affiches. Mais les paroles mielleuses de la campagne s’envoleront à coup sûr en cas de victoire électorale et les écrits resteront. Lesquels écrits sont disponibles sur le site du RN qui détaille le projet de la candidate : chacun peut s’y reporter.
C’est le cas, de manière flagrante, pour la question européenne. Sur tous les plateaux, à tous les micros, les porte-parole lepénistes assurent qu’il n’est pas question de quitter l’Union européenne, mais seulement de la réformer de l’intérieur. Lisons le texte mis en ligne par le RN : il s’agit de créer « une Alliance européenne des nations qui a vocation à se substituer progressivement à l’Union européenne ». On ne saurait être plus clair. Cette alliance des nations fonctionnerait sur la base de la souveraineté pleine et entière des pays européens, autrement dit en contradiction avec les principes fondateurs de l’Union, qui prévoient des délégations volontaires de souveraineté dans certains domaines.
La lettre politique de Laurent Joffrin | S'abonner
À titre d’exemple, la souveraineté rétablie dans son entièreté implique par nature la fin de l’euro, monnaie supranationale gérée par une Banque centrale européenne. Le RN a annexé à son projet général une fiche technique consacrée à l’Union européenne. On y lit un réquisitoire implacable, en huit points, contre les institutions de Bruxelles, vouées tout uniment aux gémonies, sans que ses rédacteurs leur reconnaissent le moindre avantage. Le RN veut s’abstraire de toute limitation en matière d’immigration, refuse toute discipline européenne, referme les frontières, y compris sur le plan commercial, veut rompre avec l’Allemagne dans le domaine militaire et avec l’ensemble des nations européennes en matière énergétique, etc. Dans l’immédiat, il refuse toute livraison d’armes à l’Ukraine, à l’inverse de la position de l’Union, et prévoit à terme une alliance avec la Russie, au moment même où les armées de Vladimir Poutine se livrent à des exactions barbares sur la population civile, dénoncées avec force par la présidente de l’Union.
Autrement dit, le mot « Frexit » est récusé, mais non la chose. Sans la quitter formellement dans un premier temps, il s’agit de disloquer la construction européenne par toutes sortes de mesures nationales, pour la remplacer ensuite par une vague coopération entre nations. Rien d’étonnant au demeurant : le RN n’a cessé de récuser Bruxelles au nom de la doctrine nationaliste qui est à la base de sa politique. Mais comme une telle rupture risque d’inquiéter les électeurs français, il la camoufle soigneusement derrière un discours plus ou moins lénifiant. Le RN se targue souvent de « dire tout haut ce que les Français pensent tout bas ». Il a inversé la maxime : il dit tout haut le contraire de ce qu’il pense tout bas.