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Un duel final Mélenchon-Le Pen ?
Mélenchon si, Mélenchon no… Plusieurs fois le leader de la France insoumise a naguère qualifié le vote utile de « camisole de force ». Aujourd’hui qu’il peut en bénéficier, il a changé d’avis. Il l’a rebaptisé « vote efficace » et en fait son argument massue dans ce premier tour. Il est vrai que la cohérence n’a jamais été son fort. Pendant des années, la France insoumise a assimilé les sondages à un « horoscope ». Il se fonde désormais sur ce même « horoscope » pour dérouler aujourd’hui son argumentaire. Vérité à 10% (dans les sondages), erreur au-delà… Question dérangeante : si, par hypothèse, Yannick Jadot, par exemple, était en tête de la gauche, Mélenchon appellerait-il les électeurs LFI à voter pour lui au nom du « vote efficace » ? Poser la question, c’est y répondre.
Au vrai l’expression « camisole de force » n’est pas dénuée de pertinence. Le vote « utile », ou « efficace », est un vote contraint qui oblige l’électeur à choisir un candidat dont il ne partage pas les idées. Faudrait-il soudain enfiler ce gilet de contention électoral parce que celui qui le dénonçait hier, s’y est opportunément converti ? On peut en douter. Les sondages, auxquels la France insoumise est soudain ralliée, montrent que l’écart entre Mélenchon et Le Pen reste stable, à environ cinq points, différence nette et sans doute décisive. Ce qui n'est guère étonnant : s’ils craignent de voir la candidate du RN dépassée par celui de LFI, les électeurs de Zemmour l’abandonneront, pour partie en tout cas, au profit de l’autre branche de l’extrême-droite. Ce qui commence à se produire : Zemmour baisse en proportion des progrès de Marine Le Pen.
En fait, l’élément majeur de ces derniers jours, c’est la chute rapide des intentions de vote en faveur d’Emmanuel Macron. En négligeant la campagne, en proposant des mesures fort peu sociales, en réactivant l’image d’un leader hautain et droitisé, le président sortant s’est mis sur une pente descendante. Ce qui nous conduit à une autre hypothèse, fort inattendue. Si la glissade de Macron se poursuit dans les deux jours qui viennent, le président sortant se retrouvera aux alentours de 20% des voix. Dans ces conditions, on peut très bien imaginer un second tour inédit. Macron en baisse, Le Pen et Mélenchon en hausse : dans le mouchoir de poche où se situeraient alors les trois candidats, le résultat deviendrait hasardeux. Le scrutin final peut très bien opposer, surprise majeure mais qui devient possible, le RN et LFI !
La lettre politique de Laurent Joffrin | S'abonner
On mesure d’ici le danger : en cas de duel Mélenchon-Le Pen, il y a fort à parier que la droite, dans sa grande majorité, choisira la candidate du RN contre celui de la gauche radicale. Quant aux électeurs de Macron, ils se retrouveront comme une poule qui a trouvé un couteau, ou comme Ulysse devant choisir entre Charybde et Scylla. Abstention massive garantie au centre… Hypothétique mais désormais possible, cette configuration donnerait à Marine Le Pen la quasi-certitude de parvenir à l’Élysée.
Au vrai, il y un moyen d’échapper à ces calculs tortueux, pour ne pas dire byzantins : respecter la logique du premier tour, et voter selon ses convictions. Il sera temps, au second, d’éliminer celui ou celle dont on ne veut à aucun prix. Autrement dit, si l’on est favorable aux écologistes, il faut voter Vert, si l’on se sent plus proche des socialistes, il faut voter PS et si l’on préfère un autre parti, il faut lui apporter son suffrage. Souvent les solutions les plus simples sont les plus légitimes. Et les moins dangereuses…