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États-Unis : la nouvelle gauche au pouvoir - Lettre politique #53
La gauche réformiste, chère à notre cœur, doit observer avec acuité les premiers pas de Joe Biden.
D’abord une leçon. Sans ce personnage à la réputation centriste, mais déterminé à corriger les aberrations de l’administration Trump, point de victoire possible. La gauche du Parti démocrate, fort critique au départ, l’a bien compris, qui s’est rangée comme un seul homme – ou comme une seule femme – derrière la bannière de ce vieux routier du centrisme libéral (au sens américain du terme, qui veut dire de gauche). Il fallait un Biden, huit ans vice-président, sénateur blanchi sous le harnois, gouvernant expérimenté, pour rallier les électeurs modérés ou abstentionnistes qui avaient permis le hold-up de Trump en 2016.
La lettre politique de Laurent Joffrin #53 | S'abonner
On dit souvent, par paresse, que la gauche réaliste est pusillanime, influencée par l’autre camp, encline au compromis honteux. Que dire, alors, des premières mesures annoncées par le nouveau président ? Les États-Unis réintègrent l’accord de Paris rompu par Trump et promettent une politique en conséquence. Le gouvernement fédéral double le montant du SMIC américain. Qui, en France, annonce une mesure de ce genre ? La nouvelle administration abandonne la construction du mur à la frontière sud des États-Unis, qui rendait tout humaniste murmurant. Elle prévoit, en quelques phrases, la régularisation de 11 millions de sans-papiers et abolit les restrictions discriminatoires qui interdisait aux musulmans de postuler pour un titre de séjour américain. Quelle force politique française ose aborder, même de loin, la régularisation des sans-papiers ? Jospin l’avait fait. Depuis, silence radio.
Le nouveau régime, qui revient en fait à la normale progressiste, projette un deuxième plan massif d’aide et d’investissement pour soutenir l’économie et limiter la casse sociale consécutive à la pandémie de coronavirus. Ce plan comprend des investissements verts spectaculaires, une protection de l’industrie nationale, des subventions conséquentes aux nouvelles technologies. La relance massive ainsi décidée n’a rien d’un retour à l’ancien temps. Elle s’inspire, de toute évidence, des « green new deal » concoctés par la gauche du Parti démocrate ou par les partis européens progressistes, acceptés par la Commission européenne.
Biden projette aussi de régler le lancinant problème de l’endettement étudiant, qui établissait une scandaleuse injustice dans l’accès à l’enseignement supérieur. Il prévoit enfin un virage en épingle à cheveu en matière de politique étrangère. Certes, il s’agira d’abord de faire pièce à la montée en puissance de la Chine, seul héritage positif du mandat Trump. Mais aussi de rétablir avec les autres démocraties des rapports confiants et normaux.
Bref les premiers gestes de Joe Biden sont ceux d’un président de la gauche réformiste, crédible et audacieux. Prenons-en de la graine