Les charlatans de la COVID - La lettre politique de Laurent Joffrin #27

Laurent Joffrin | 16 Novembre 2020

Les charlatans de la Covid

La vérité, disent les optimistes, finit toujours par s’imposer avec le temps. Certes. Mais c’est parfois très long… Surtout dans un débat public infesté de mensonges, de fausses nouvelles et d’entreprises délibérées de désinformation, celui qui s’est imposé dans les grandes démocraties avec le concours actif de « réseaux sociaux » qui mériteraient d’être rebaptisés « réseaux antisociaux », tant ilssapent continûment la base même de la délibération démocratique.  

Le rebond de la pandémie de Covid 19, devrait au moins sceller le sort de trois diffuseurs de balivernes qui ont occupé le devant de la scène depuis des mois. Il s’agit d’abord du professeur Perrone, pourtant diplômé à souhait et détenteur d’un poste important dans un grand hôpital, qu’on a vu et revu sur tous les plateaux. Il vient de collaborer à ce tissu de fake news appelé « Holp-Up », un long « documentaire » (un documenteur, en fait) qui accuse une vaste coalition d’intérêts occultes d’avoir sciemment manipulé l’opinion dans le drame de la Covid. Inutile d’entrer dans une argutie technique. Le 25 octobre dernier, ledit professeur Perrone qualifiait « d’artificielle » la seconde vague de l’épidémie annoncée par le Comité scientifique qui conseille le gouvernement. On a vu l’artifice : deux semaines plus tard, les hôpitaux sont engorgés et le nombre des décès retrouve les chiffres désastreux enregistrés au printemps dernier. Un tel démenti infligé aux thèses de Perrone par la réalité devrait le faire rentrer sous terre. Il devrait, en tout cas, le rayer définitivement de la liste des commentateurs crédibles en matière de santé publique.

Même tarif pour un autre de ces « rassuristes » qui ont amusé la galerie à la rentrée, commeJean-François Toussaint, pourtant lui aussi muni des parchemins de rigueur. Sans nier formellement qu’il puisse y avoir une deuxième vague « si le virus mute », il s’est lui aussi insurgé contre le Conseil scientifique qui tirait la sonnette d’alarme en des termes tout aussi péremptoires, alors que, malheureusement, les avertissements lancés au début de l’été par le Conseil se sont révélés exacts. Là encore, la réalité vient départager les protagonistes.

Reste le plus connu des dissidents, encore plus titré puisqu’il est désigné par ses pairs comme un très bon spécialiste des virus : le subtil et nuancé Didier Raoult, druide en chef d’une secte dissidente au look très Panoramix, muni de sa potion magique anti-Covid. Après avoir proféré sur un ton sans réplique un certain nombre d’énormités (l’épidémie n’est pas grave, elle s’est arrêtée, elle est derrière nous, etc.) il continue de proclamer l’efficacité miraculeuse de son médicament, alors qu’aucune étude sérieuse ne vient corroborer ses dires. La dernière en date, « Solidarity », fondée sur un large échantillon et réalisée en double aveugle, conclut à l’inexistence d’un traitement convaincant contre la Covid. Peu importe : les vérités alternatives n’ont pas besoin de preuve. Léger inconvénient : le discours « rassuriste » a probablement incité une partie de la population à relâcher sa vigilance, ce qui se paie en nombre de morts.

Tout cela traduit un phénomène de fond : le recul de la rationalité publique, le règne des charlatans sur les réseaux, la fortune médiatique de ceux qui proclament l’équivalence des vessies et des lanternes. Quand un homme ou une femme politique commet une erreur factuelle, il ou elle est immédiatement dénoncée à son de trompe. Quand un bonimenteur accumule les sornettes, on lui tend un micro en invoquant le pluralisme et le refus de la pensée unique.

Comment lutter ? D’abord en étendant la responsabilité juridique des directeurs de médias classiques aux maîtres des grands réseaux numériques, qui rentreraient ainsi dans le droit commun au lieu de s’arroger le pouvoir de censurer ce qui bon leur semble, selon des critères connus d’eux seuls et établis en dehors de toute légitimité démocratique. En créant aussi une véritable autorité de régulation des réseaux sociaux, en capacité de détecter tout message contraire à la loi, incitant à la haine ou à la violence

Ensuite en défendant bec et ongle les vrais scientifiques, ouverts dans la recherche, prudents dans leurs prévisions, qui savent reconnaître une erreur mais qui sont fermes dès qu’il s’agit de faits établis. Ce serait un premier pas…

 

Laurent Joffrin

À propos de

Président du mouvement @_les_engages