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Protéger notre patrimoine naturel contre l’artificialisation des sols
L’artificialisation des sols provoque en France d’importants dégâts en termes d’érosion de la biodiversité et d’altération des paysages. Le phénomène, qui peut être défini comme tout processus qui conduit à une perte d’espaces naturels, agricoles ou forestiers à la suite d’un changement d’usage et de structure des sols connaît depuis plusieurs années une évolution régulière et continue.
I. Le contexte
Artificialisation : de quoi parle-t-on ?
Le projet de loi « Climat »[1] adopté par l’Assemblée nationale promeut un objectif de « sobriété foncière », avec l’ambition « d’atteindre, en 2050, l’objectif d’absence de toute artificialisation nette des sols », ce qui suppose que le rythme de l’artificialisation des sols dans les dix prochaines années soit « tel que, sur cette période, la consommation totale d’espace observée soit inférieure à la moitié de la consommation d’espace observée sur les dix années précédant cette date » (art. 47). Dans un souci louable de définition, le même projet regarde un sol comme artificialisé « si l’occupation ou l’usage qui en est fait affectent durablement tout ou partie de ses fonctions écologiques, en particulier ses fonctions biologiques, hydriques et climatiques ainsi que son potentiel agronomique. Les surfaces de pleine terre ne sont pas considérées comme artificialisées » (art. 48).
Une progression continue dont il faut cependant ne pas exagérer l’ampleur
En France, on estime qu’environ 20 000 hectares d’espaces naturels ont été artificialisés chaque année en moyenne sur les quinze dernières années. L’équivalent en surface d’un département français disparaîtrait ainsi par artificialisation tous les dix ans. Cette donnée est cependant à relativiser. Quoique les résultats diffèrent légèrement selon les sources, on estime entre 9,3% et 9,6% le taux d’artificialisation du territoire national métropolitain. L’habitat représente 41,9 % des terres artificialisées, les réseaux routiers 27,8 %, les services et les loisirs 16,2 %.
Les conséquences multiples et préoccupantes de l’artificialisation
Suivant l’origine du phénomène, l’artificialisation des sols emporte des conséquences diverses. La consommation de terres agricoles affaiblit les capacités du pays à subvenir à l’alimentation de la population et conduit à une perte de souveraineté alimentaire dans un contexte de croissance démographique qui s’accompagne d’un accroissement des besoins alimentaires.
Plus récemment est apparue en outre la tentation d’utiliser des sols agricoles pour des installations photovoltaïques afin de produire de l’énergie renouvelable « propre ». C’est une tendance contre laquelle il faut s’opposer notamment par la solution « agrivoltaïque », combinant sur une même surface une culture agricole à pérenniser et une installation PV protégeant les cultures des intempéries et des excès d’ensoleillement.
Par ailleurs, la construction d’habitations humaines est responsable d’une imperméabilisation totale ou partielle des sols. Elle amplifie les phénomènes de ruissellement et accroît les risques d’inondation tandis qu’elle dégrade la qualité chimique et écologique des eaux. Ces dégradations sont amplifiées par l’étalement urbain qui participe à l’augmentation des déplacements ainsi qu’à celle des émissions de polluants et de gaz à effet de serre.
Mais l’artificialisation emporte aussi des conséquences particulièrement préoccupantes sur la destruction des milieux naturels et des espèces animales et végétales qui en dépendent. En détruisant les habitats naturels, elle compromet les continuités écologiques nécessaires à la faune sauvage pour circuler. De fait, elle fragilise les conditions d’existence des espèces menacées et contribue à accélérer leur disparition. En transformant, parfois de façon irrémédiable, l’habitat naturel de certaines espèces, elle réduit la capacité de résilience des milieux ainsi affectés. La perte d’espaces non fragmentés et la présence d’obstacles perturbent ainsi les populations de certaines espèces dans l’accomplissement de leur cycle de vie, leurs migrations, voire le déplacement de leur aire de répartition dans le cadre des changements climatiques.
Enfin, l’artificialisation est étroitement liée à une urbanisation anarchique et mal maîtrisée et à la dégradation des paysages notamment des paysages urbains. Pour ne prendre qu’un seul exemple, la multiplication des surfaces commerciales de grande dimension à la périphérie des agglomérations à la recherche de nouvelles ressources fiscales a largement contribué à accélérer l’artificialisation, transformant du même coup les paysages des entrées de ville en une succession anarchique d’implantations et d’enseignes. Non seulement les grandes surfaces commerciales ont contribué à l’artificialisation – bâtiments, parkings, entrepôts, etc. – mais elles ont contribué à la dégradation des paysages urbains et à une forte pollution visuelle autant que lumineuse.
Lutter de façon raisonnée contre l’artificialisation
Le constat étant dressé, il ne s’agit pas ici de rejeter par principe l’artificialisation au seul motif qu’elle contribuerait à un appauvrissement de la biodiversité. En premier lieu, l’artificialisation peut parfois être nécessaire – en particulier pour la mise en œuvre d’une politique de logements à des coûts abordables. En deuxième lieu, la lutte contre le phénomène doit distinguer selon les types d’occupation des sols, leur qualité, le degré d’urbanisation des territoires, la pression démographique, etc. À cet égard, la préoccupation devrait être autant celle de la densification de l’espace rural que celle de l’étalement urbain. Le mitage des territoires ruraux, en créant des ruptures dans les continuités écologiques, démultiplie les effets de l’artificialisation et renforce l’importance de maîtriser l’extension urbaine. En troisième lieu, il est impossible de raisonner en fonction d’un principe de compensation pensé en termes purement quantitatifs – en termes de mètres carrés artificialisés et renaturés sans prendre en compte les fonctions du sol et ses qualités écosystémiques.
La politique de « zéro artificialisation nette » souffre généralement d’une insuffisante prise en compte de cette complexité. Ainsi, le « zéro artificialisation nette » ne signifie pas la fin de l’artificialisation des sols mais consacre plutôt la nécessité de « renaturer » des surfaces artificialisées à mesure que l’on en artificialise d’autres et de se donner les outils pour le faire.
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II. Pour faire face à ce phénomène, plusieurs outils juridiques peuvent être mobilisés
Les outils de planification offerts par le code de l’urbanisme – schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET) (art. L.4251-1 CGCT), les schémas de cohérence territoriale (SCOT) (art. L.141-1 et s. C. urb.), les PLU ou PLUi (art. L.151-1 et s. C. urb.), etc. – ont notamment pour objet d’offrir aux élus locaux des instruments de maîtrise des implantations urbaines, lutter contre le « mitage », respecter des obligations en matière de surface ou de hauteur par l’imposition de servitudes d’urbanisme.
Le Code de l’urbanisme porte également des dispositions relatives aux « espaces protégées » (chap. III du titre 1er du livre 1er), qui prévoient notamment que les plans locaux d’urbanisme peuvent classer comme espaces boisés, les bois, forêts, parcs à conserver, à protéger ou à créer (art. L. 113-1 C. urb.) et qui donnent également compétence au département pour élaborer et mettre en œuvre une politique de protection, de gestion et d’ouverture au public des espaces naturels sensibles (art. L.113-8 C. urb.), et pour mettre en œuvre une politique de protection et de mise en valeur des espaces agricoles et naturels périurbains (art. L. 113-15 C. urb.).
Mentionnons également, et parmi d’autres outils, la loi « Littoral » et la loi « Montagne » qui ont pour objets respectifs, de maîtriser l’urbanisation et donc l’implantation dans les territoires littoraux et les zones de montagne (art. L.121-1 et s. et L. 122-1 et s. C. urb.).
Mentionnons également l’outil fiscal – taxes sur le foncier bâti et non bâti – qui peut également permettre de taxer l’occupation d’espaces.
Dans un autre registre, on peut mentionner l’ensemble des servitudes d’utilité publiques : définition de parcs nationaux (art. L.331-1 C. env.), définition de réserves naturelles nationales (L. 332-1 et s. C. env.), création de parcs naturels régionaux (art. L.333-1 et s. C. env.). Signalons également la possibilité pour les préfets de prendre des « arrêtés de biotope » qui permettent de protéger la « biocénose » présente sur le « biotope » (L. 411-1 et s. C. env.). Le classement de site de la loi de 1930 codifié à l’article L.341-1 et s. du Code de l’environnement sont également un moyen de protéger le patrimoine naturel contre les atteintes liées à l’urbanisation notamment.
Enfin les trames vertes et les trames bleues de l’article L.371-1 et s. du Code de l’environnement doivent contribuer à enrayer la perte de biodiversité en participant à la préservation, à la gestion et à la remise en bon état des milieux nécessaires aux continuités écologiques, tout en prenant en compte les activités humaines, et notamment agricoles, en milieu rural ainsi que la gestion de la lumière artificielle la nuit.
Il faudrait également mentionner les dispositions du Code rural et de la pêche maritime (CRPM) en faveur de la protection de l’espace rural, à commencer par son article L.111-1 en vertu duquel : « L’aménagement et le développement durable de l’espace rural constituent une priorité essentielle de l’aménagement du territoire. La mise en valeur et la protection de l’espace agricole et forestier prennent en compte ses fonctions économique, environnementale et sociale. »
Enfin, parmi les autres dispositions applicables, mentionnons celle du Code forestier qui visent à protéger les espaces forestiers, et celle du Code de commerce qui encadrent les implantations en matière d’urbanisme commercial.
On le voit, les outils législatifs et réglementaires sont nombreux. Pourtant, force est de constater que ce véritable arsenal juridique n’a pas suffi à enrayer l’artificialisation des sols et le recul de la biodiversité sur notre territoire, notamment le territoire métropolitain. Outre les « trous dans la raquette » juridique, la rigueur apparente des principes et des règles en matière de protection de l’espace s’accommode assez souvent de « dérogations » qui ont notamment pour effet de desserrer les contraintes en matière de lutte contre l’artificialisation (voir annexe).
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III. Aller vers un objectif « zéro artificialisation nette » appelle des mesures ambitieuses
Le projet de loi « Climat » fixe un objectif de « zéro artificialisation nette » en 2050. Cela signifie que pendant encore 30 ans, d’importantes surfaces vont continuer à être bétonnées, goudronnées, asphaltées, davantage, en tout cas, que de mètres carré rendus à la nature. Il importe d’accélérer.
Pour renforcer la lutte contre l’artificialisation en vue de mettre en œuvre la stratégie « zéro artificialisation nette » à l’horizon 2040, il importe d’abord de mieux connaître les dynamiques d’artificialisation. Il faut assurer un suivi précis de l’artificialisation au niveau local et être en mesure de rassembler et de compiler ces données au niveau national ces données.
Ensuite, parmi les mesures qui pourraient être proposées, il importe de modifier les règles d’urbanisme pour favoriser le renouvellement urbain et la densification de l’habitat, et renaturer les espaces artificialisés laissés à l’abandon.
Plusieurs mesures sont possibles pour éviter les incitations à l’artificialisation[2] :
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Proposition n°1 :
Mieux encadrer et réglementer les constructions dans des zones non urbanisées :
- imposer une obligation de densification par l’instauration dans les PLU d’un plancher de densité[3] et d’un taux plancher de renouvellement urbain[4] dans chaque commune pour les constructions nouvelles ;
- imposer un avis conforme (et non plus une simple « consultation ») de la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF) (transformée en un « conseil départemental de lutte contre l’artificialisation des terres », voir proposition n°5) avant toute autorisation de constructions et d’installations nécessaires à la réalisation d’une « opération d’intérêt national » (OIN)[5] en dehors des parties urbanisées (voir annexe) et pour l’ensemble des dérogations prévues à l’article L.111-4 du Code de l’urbanisme (voir annexe). De la sorte, aucune dérogation ne pourra être adoptée contre l’avis du nouveau conseil départemental.
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Proposition n°2 :
Mobiliser l’outil fiscal pour encourager la densification de l’habitat et décourager l’artificialisation (voir également proposition n°6).
- exclure de l’éligibilité au dispositif de défiscalisation (dispositif « Pinel »[6]) ou de prêt bonifié les constructions sur des terres non artificialisées ;
- exonérer totalement de taxe d’aménagement[7] les projets qui ne changent pas l’emprise au sol bâti (surélévation, rénovation, reconstruction) (compléter la liste des exonérations listées aux art. L.331-7 à L.331-9 du C. urb.).
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Proposition n°3 :
Instaurer pendant trois ans un moratoire sur la création ou l’agrandissement de nouvelles surfaces commerciales supérieures à une certaine taille (700 ou 1 000m2) en périphérie d’agglomération.
Précisions sur la proposition :
Il s’agit contrôler la cohérence des projets au regard de leur intégration dans le tissu urbain et de la mixité de fonctions qu’ils proposent tout en prenant en compte l’impact de ces implantations sur la circulation automobile et donc sur la pollution atmosphérique comme sur l’artificialisation de l’espace.
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Proposition n°4 :
Elargir l’utilisation des droits de préemption urbain, institués par le titre Ier du livre II du Code de l’urbanisme (art. L.210-1 et s.), aux actions ou opérations visant à sauvegarder ou à mettre en valeur les espaces naturels, à préserver la qualité de la ressource en eau, ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d’aménagement (voir annexe).
Précisions sur la proposition :
a) Parmi les outils de maîtrise foncière susceptibles d’être mobilisés contre l’artificialisation, on trouve diverses versions du droit de préemption:
- Le droit de préemption dans les espaces naturels sensibles reconnu au département (art. L.113-14 et L. 215-1 C. urb.) pour mettre en œuvre la politique prévue à l’article 113-8 (voir supra., p. 2): le département peut créer des zones de préemption dans les conditions définies aux articles L. 215-1 et s. avec possibilité de délégation en vertu du L.215-8.
- Le droit de préemption attribué au Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres (par l’art. L.215-2) pour la préservation des ressources en eau destinées à la consommation humaine (art. L.218-1 et s.).
- Le droit de préemption reconnu aux SAFER[8] dans les conditions et limites fixées par l’article L.143-1 du CRPM. L’exercice de ce droit, qui ne concerne que les biens immobiliers à usage agricole, peut avoir pour objet, en vertu de l’article L.143-2, « la mise en valeur et la protection de la forêt » (7°), « La protection de l’environnement, principalement par la mise en œuvre de pratiques agricoles adaptées (…) » (8°) et « la protection et la mise en valeur des espaces agricoles et naturels périurbains » (9°).
b) L’article L.113-24 du Code de l’urbanisme prévoit qu’à l’intérieur d’un périmètre d’intervention (mentionné à l’article L.113-16[9] défini dans le cadre de la politique de protection et de mise en valeur des espaces agricoles et naturels périurbains, les terrains peuvent être acquis par le département ou, avec l’accord de celui-ci, par une autre collectivité territoriale ou un établissement public de coopération intercommunale, à l’amiable ou par expropriation.
La création d’un périmètre de protection et de mise en valeur des espaces agricoles et naturels périurbains fait ainsi naître un nouveau droit de préemption. En effet, l’article L.113-24 C. urb. précise qu’à l’intérieur d’un périmètre d’intervention, les terrains peuvent également être acquis par exercice du droit de préemption classique (voir a).
Effets attendus de la proposition :
Il est remarquable que parmi les titulaires d’un droit de préemption à « vocation environnementale » (protection des espaces naturels sensibles ou des espaces ruraux) mentionnés ci-dessus ne figurent pas les communes et leurs groupements. La proposition n°4 vise donc à élargir l’utilisation du droit de préemption reconnu à ces organismes par le Code de l’urbanisme à la protection de l’ensemble des objets définis à l’article L.300-1 de ce code, y compris la sauvegarde ou la mise en valeur du patrimoine non bâti et des espaces naturels.
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Proposition n°5 :
Mettre en place une gouvernance de la lutte contre l’artificialisation des sols en vue de mettre en cohérence les instruments de planification.
Ainsi, trois types d’instances pourraient être envisagés :
- à l’échelle des intercommunalités, responsables de l’élaboration des PLUi, définir, dans le cadre de ces documents de planification, des cibles d’espaces naturels susceptibles d’être artificialisés ainsi que des surfaces à renaturer ;
- à l’échelle des départements, fusionner les missions et les compétences de la commission départementale d’aménagement commercial (CDAC) et de la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF) en un nouveau conseil départemental de lutte contre l’artificialisation des terres chargé de la délivrance des autorisations d’artificialisation des espaces naturels (voir proposition n°1) et renforcer la représentation des associations de protection de l’environnement au sein de cette instance[10] ;
- à l’échelle nationale, mettre en place un conseil national de lutte contre l’artificialisation des terres, chargé du suivi transversal de l’ensemble des mesures mises en place, auquel serait rattaché l’Observatoire de l’artificialisation des sols.
Effet attendu de la proposition :
Il s’agit de faire de la lutte contre l’artificialisation un objectif à part entière des politiques d’aménagement du territoire.
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Proposition n°6 :
Combiner renaturation et artificialisation.
Pour atteindre l’objectif « zéro artificialisation nette » à l’horizon 2040, il serait utile de conditionner l’artificialisation à une renaturation équivalente. Deux dispositifs sont envisageables :
- mettre en place un marché de droits à artificialiser contre renaturation dans une logique d’ « internalisation des externalités ». Cette renaturation pourrait faire l’objet de la délivrance d’un label, délivré sur la base de critères transparents, par une autorité garantissant la qualité environnementale de la renaturation[11] ;
- financer la renaturation en ajoutant une composante artificialisation à la taxe d’aménagement et en affectant les recettes au financement d’opérations de renaturation des sols et de densification du foncier bâti existant.
Auteur : Patrick Vieu
ANNEXE
La rigueur apparente des principes et des règles en matière de protection de l’espace s’accommode assez souvent de « dérogations » qui ont notamment pour effet de desserrer les contraintes en matière de lutte contre l’artificialisation. Par exemple :
- L’article L.102-13 du Code de l’urbanisme permet de déroger à la règle fixée à l’article L.111-3 du même code[12] dans le cadre d’opérations d’intérêt national (OIN). Ainsi, les constructions et installations nécessaires à la réalisation d’une OIN peuvent être autorisées en dehors des parties urbanisées de la commune. Le 1° de l’article L.102-13 précise que : « Si ces constructions et installations nouvelles ont pour conséquence une réduction des surfaces sur lesquelles est exercée une activité agricole ou qui sont à vocation agricole ou si ces constructions ont pour conséquence une réduction des surfaces situées dans les espaces naturels et forestiers, l’autorisation est délivrée après consultation de la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers». La consultation de cette commission, dont la création est prévue à l’article 112-1-1 du Code rural et de la pêche maritime, n’est pas engageante.
- L’article L.111-4 du Code de l’urbanisme autorise, en dehors des parties urbanisées de la commune :
- l’extension des constructions existantes ou la construction de « bâtiments nouveaux » à usage d’habitation à l’intérieur du périmètre regroupant les bâtiments d’une ancienne exploitation agricole (dans le respect des traditions architecturales locales),
- les constructions et installations nécessaires à l’exploitation agricole, à des équipements collectifs dès lors qu’elles ne sont pas incompatibles avec l’exercice d’une activité agricole, pastorale ou forestière sur le terrain sur lequel elles sont implantées, à la réalisation d’aires d’accueil ou de terrains de passage des gens du voyage, à la mise en valeur des ressources naturelles et à la réalisation d’OIN,
2. bis les constructions et installations nécessaires à la transformation, au conditionnement et à la commercialisation des produits agricoles, lorsque ces activités constituent le « prolongement de l’acte de production » et dès lors qu’elles ne sont pas incompatibles avec l’exercice d’une activité agricole, pastorale ou forestière sur le terrain sur lequel elles sont implantées.
- les constructions et installations incompatibles avec le voisinage des zones habitées – on pense essentiellement aux ICPE – et l’extension « mesurée » des constructions et installations existantes ;
- les constructions ou installations, sur délibération motivée du conseil municipal, si celui-ci considère que l’intérêt de la commune, en particulier pour éviter une diminution de la population communale, le justifie, dès lors qu’elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages, à la salubrité et à la sécurité publiques, qu’elles n’entraînent pas un surcroît important de dépenses publiques et que le projet n’est pas contraire aux objectifs de développement visés à l’article 101-2 et aux dispositions relatives à la protection du littoral et de la montagne ou aux directives territoriales d’aménagement précisant leurs modalités d’application.
- l’extension des constructions existantes ou la construction de « bâtiments nouveaux » à usage d’habitation à l’intérieur du périmètre regroupant les bâtiments d’une ancienne exploitation agricole (dans le respect des traditions architecturales locales),
Certes, il existe quelques garde-fous à ces dérogations. Notamment, les constructions et installations visées au 2° bis ne peuvent pas être autorisées dans les zones naturelles, ni porter atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages. Et l’autorisation d’urbanisme est soumise pour avis à la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers prévue à l’article L.112-1-1 du CRPM, mais c’est un avis simple qui ne lie pas la commune. Il en va de même pour la plupart des autres dérogations autorisées.
- L’article L.111-5 prévoit que la construction de bâtiments nouveaux mentionnée au 1° de l’article L.111-4[13] et les projets de constructions, aménagements, installations et travaux mentionnés aux 2° et 3° ci-dessus ayant pour conséquence une réduction des surfaces situées dans les espaces autres qu’urbanisés et sur lesquelles est exercée une activité agricole ou qui sont à vocation agricole doivent être préalablement soumis pour avis par l’autorité administrative compétente de l’Etat à la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers. Mais dans les cas c’est un avis simple. Seule la délibération mentionnée au 4° ci-dessus est soumise pour avis conforme à cette même commission départementale. Cet avis est réputé favorable (et non défavorable) s’il n’est pas intervenu dans un délai d’un mois à compter de la saisine de la commission.
5. Les droits de préemption urbain institués par le titre Ier du livre II du Code de l’urbanisme (art. L.210-1 et s.) ne peuvent pas être exercés pour des actions ou opérations « visant à sauvegarder ou à mettre en valeur les espaces naturels, à préserver la qualité de la ressource en eau, ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d’aménagement».
6. Enfin, dans un autre registre, l’article L.142-5 du Code de l’urbanisme ouvre la possibilité de déroger à l’article 142-4[14] avec l’accord du préfet après avis de la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers et, le cas échéant, de l’EPCI (ou du syndicat ou du PETR[15]) compétent en matière de SCOT en vertu de l’art. L.143-16. La dérogation ne peut être accordée que si l’urbanisation envisagée ne nuit pas à la protection des espaces naturels, agricoles et forestiers ou à la préservation et à la remise en bon état des continuités écologiques, ne conduit pas à une consommation excessive de l’espace, ne génère pas d’impact excessif sur les flux de déplacements et ne nuit pas à une répartition équilibrée entre emploi, habitat, commerces et services.
[1] Projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.
[2] Certaines propositions présentées ci-après s’inspirent du rapport établi par Julien Fosse et alii pour France Stratégie : Objectif, zéro artificialisation nette : quels leviers pour protéger les sols ? Juillet 2019.
[3] La densité est le ratio entre la surface de plancher et la taille de la parcelle. Par exemple, un immeuble de 3 étages (R + 3) avec une emprise au sol de 100 m2 construit sur une parcelle de 1 000 m2 aura une densité de (4 x 100)/1 000 = 0,4. Sur la période 2007-2015, la densité des constructions nouvelles est estimée à 0,16, ce qui équivaut à une maison de plain-pied de 160° m2 (ou une maison à 2 étages de 80 m2 d’emprise au sol) sur une parcelle de 1 000 m2.
[4] Le taux de renouvellement urbain mesure la part, dans la totalité des mètres carrés construits sur une période donnée, de ceux qui le sont sur des terres déjà artificialisées. Entre 2006 et 2014, ce taux était de 43%.
[5] Une opération d’intérêt national est une « opération d’aménagement qui répond à des enjeux d’une importance telle qu’elle nécessite une mobilisation de la collectivité nationale et à laquelle l’Etat décide par conséquent de consacrer des moyens particuliers ». La qualification d’OIN est attribuée par décret en Conseil d’Etat (C. urb. art. L.102-12).
[6] Le dispositif « Pinel » est tourné vers la production de logements intermédiaires. Il ne concurrence donc pas le logement social, mais le complète, en facilitant le parcours résidentiel des ménages. Certains opérateurs de logement social eux-mêmes produisent du logement intermédiaire, sous la forme du Pinel « institutionnel ». Le Pinel est un outil de politique publique qui produit ce pour quoi il a été créé : des volumes importants (50 à 60 000 par an) de logements neufs de qualité en zones tendues, loués à des ménages des classes moyennes à des loyers intermédiaires entre le logement social et le marché libre.
[7] La taxe d’aménagement s’applique à toutes les opérations soumises à autorisation d’urbanisme : construction, reconstruction et agrandissement de bâtiments, aménagement et installation de toute nature. Elle s’applique également aux changements de destination des locaux agricoles. Elle est due par le bénéficiaire de l’autorisation de construire ou d’aménager ou par le responsable d’une construction illégale. Elle est perçue par les communes ou les EPCI, la métropole de Lyon, les départements, la collectivité de Corse et la région d’Île-de-France (C. urb. L. 331-1). Le montant de la taxe est calculé par application du taux voté par la collectivité territoriale au produit de la surface taxable par une valeur au m2 de surface fixée chaque année par arrêté (759 €/m2 hors Île-de-France en 2020, 860€/m2 en Île-de-France).
[8] Société sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (SAFER) La loi du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt a modifié l’art. L.141-1 du Code rural pour autoriser la constitution de SAFER afin d’œuvrer prioritairement à la protection des espaces agricoles, naturels et forestiers tout en concourant à la diversité des systèmes de production, notamment ceux permettant de combiner les performances économique, sociale et environnementale et ceux relevant de l’agriculture biologique. Dans ce cadre, les SAFER « concourent à la diversité des paysages, à la protection des ressources naturelles et au maintien de la diversité biologique » et « contribuent au développement durable des territoires ruraux.
[9] L’article L.113-16 C.urb., ouvre la possibilité au département ou à un EPCI (ou à un syndicat mixte ou à un PETR) de délimiter des périmètres d’intervention associés à des programmes d’action avec l’accord de la ou des communes concernées ou des établissements publics compétents en matière de PLU, après avis de la chambre départementale d’agriculture et enquête publique.
[10] La composition de cette commission, définie par le décret n°2015-644 du 9 juin 2015 (pour la métropole hors Corse) prévoit la présence des présidents de deux associations de protection de l’environnement agréées désignées par le préfet, lequel préside la commission. Pourrait être proposé que toutes les associations agréées présentes à l’échelle du département siègent à la commission sans que leur représentation soit nécessairement assurée par leur président.
[11] Ce dispositif se heurte cependant à plusieurs obstacles. D’une part, le coût de la renaturation est a priori trop élevé pour que l’offre puisse rencontrer la demande sur ce type de marché. Contrairement, par exemple, aux émissions de CO2, l’artificialisation n’est pas un processus binaire pas plus que la renaturation. Il ne serait donc pas forcément approprié de mettre le même prix pour tout type d’artificialisation et n’importe quel territoire. Malgré ses avantages notamment le fait d’améliorer la connaissance des sols, de leurs fonctions écosystémiques et des coûts de la renaturation, le dispositif pourrait rapidement atteindre une complexité rédhibitoire.
[12] En vertu du L.111-3 du Code de l’urbanisme, « En l’absence de plan local d’urbanisme, de tout document d’urbanisme en tenant lieu ou de carte communale, les constructions ne peuvent être autorisées que dans les parties urbanisées de la commune. »
[13] Il s’agit de constructions existantes ou la construction de bâtiments nouveaux à usage d'habitation à l'intérieur du périmètre regroupant les bâtiments d'une ancienne exploitation agricole.
[14] En vertu de cet article, dans les communes où un SCOT n’est pas applicable, 1° les zones naturelles, agricoles ou forestières d’un PLU ou d’un document en tenant lieu ne peuvent être ouvertes à l’urbanisation à l’occasion de l’élaboration ou d’une procédure d’évolution d’un document d’urbanisme ; 2° Les secteurs non constructibles des cartes communales ne peuvent être ouverts à l’urbanisation à l’occasion de l’élaboration ou d’une procédure d’évolution de la carte communale ; 3° Les secteurs situés en dehors des parties urbanisées des communes non couvertes par un document d’urbanisme ne peuvent être ouverts à l’urbanisation pour autoriser les projets mentionnés aux 3° et 4° de l’article L.111-4. Il s’agit notamment des ICPE.
[15] Le PETR (pôle d’équilibre territorial et rural) est un établissement public constitué par accord entre plusieurs EPCI à fiscalité propre et, le cas échéant, une commune nouvelle.