Retrait de la gauche en PACA : le choix de la clarté et de la rigueur républicaine

Laurent Joffrin | 21 Juin 2021

La gauche peut-elle laisser le Rassemblement national s’emparer d’une région sans réagir ? Doit-elle, pour conserver quelques sièges dans un conseil régional, offrir à Marine Le Pen une victoire qu’elle ne manquera pas d’utiliser à grand bruit dans la campagne présidentielle à venir ?

On argue, pour justifier un maintien de la liste de gauche qualifiée pour le second tour des régionales, des risques que lui ferait courir son absence dans une instance de décision importante. Le sacrifice est réel et l’on comprend que tel ou tel candidat, telle ou telle liste, ne se résigne pas de bon cœur à s’effacer d’un conseil aux prérogatives étendues, au bénéfice de ses concurrents de droite.

Mais nous affirmons ici que le danger de la confusion est bien pire. Peut-on à la fois dénoncer le Rassemblement national comme une formation différente, aux thèses xénophobes et aux intentions étrangères à la tradition républicaine, et jouer les Ponce-Pilate quand il menace de conquérir la région Provence-Alpes-Côte d’Azur ? Laisser gagner le RN, c’est concourir à sa banalisation, c’est lui permettre de se présenter en gestionnaire compétent, c’est lui octroyer indûment le titre de « parti comme les autres ». C’est, surtout, désavouer à l’avance la critique nécessaire qu’on développera contre lui au moment de la campagne présidentielle. Et, dans la pire des hypothèses, si sa force électorale se confirme en 2022, c’est lui fournir un marchepied pour la conquête de l’Élysée.

Le 13 juin dernier, les partis de gauche manifestaient ensemble, dans plus de 300 villes, pour dénoncer la progression des idées lepénistes. Peuvent-ils, quelques jours plus tard, rester neutres quand les mêmes idées sont sur le point de triompher dans une grande région du pays ? Peuvent-ils accréditer la thèse absurde selon laquelle les partis de droite ou du centre, somme toute, ne sont guère différents du RN ? Il n’y aurait pas meilleur moyen d’accorder à Marine Le Pen un brevet de respectabilité qui lui servira en 2022. Et dans ce cas – qui n’est plus invraisemblable – croit-on que la politique qu’elle mènerait – lois répressives, chasse aux immigrés, dissociation de l’Europe, régression culturelle, triomphe des rhétoriques autoritaires – ressemblera à celle des autres partis ? Dans cette circonstance, entre deux maux, il faut choisir le moindre.

La gauche a fait le bon choix, celui de la clarté et de la rigueur républicaine, en se retirant dans la région PACA, où le premier tour a mis le RN en position de l’emporter. Non pour appeler à un « front républicain » quelque peu mythique, mais simplement pour rester en accord avec ses propres principes. C’est-à-dire tout faire pour barrer la route au parti de l’intolérance et de la régression identitaire.

Laurent Joffrin

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Président du mouvement @_les_engages